Décryptage des ordonnances impactant le droit public #Covid19
Publicado el :
02/04/2020
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Le premier anniversaire du Code de la Commande Publique est marqué par les circonstances exceptionnelles rencontrées avec le covid-19. La loi du 23 mars 2020 a déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, soit la publication au JO du 24 mars 2020. La durée de l’état d’urgence sanitaire liée au covid-19 est donc fixée, à ce jour, jusqu’au 24 mai 2020. Les ordonnances du 25 mars 2020 traitent non seulement des difficultés de passation et d’exécution des contrats qui relèvent du Code de la Commande Publique, mais aussi, plus globalement, de tous les contrats publics, des décisions administratives et des règles de procédures devant les juridictions administratives pour la durée de l’état d’urgence sanitaire.
Adaptation des délais et procédure de passation des contrats publics
Tous les contrats publics en cours ou conclus durant la période courant du 12 mars 2020 jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire, augmentée d’une durée de deux mois, soit du 12 mars 2020 au 24 juillet 2020.
- Adaptation des délais de passation des contrats soumis au CCP:
Les délais de réception des candidatures et des offres dans les procédures en cours sont prolongés d’une durée suffisante, fixée par l’autorité contractante, pour permettre aux opérateurs économiques de présenter leur candidature ou de soumissionner.
- Adaptation des modalités de mise en concurrence définies en application du CCP et dans le dossier de consultation:
Possibilité de les aménager en cours de procédure dans le respect du principe d’égalité de traitement des candidats. On pense ici aux modalités de visite obligatoire des lieux, à l’organisation de négociation, aux modalités de re mise d’échantillons….
- Gestion des termes des contrats et conclusion d’avenants de prolongation :
Tous les contrats arrivant à terme entre le 12 mars et le 24 juillet 2020 peuvent faire l’objet d’un avenant de prolongation lorsque l’organisation d’une procédure de mise en concurrence ne peut être mise en œuvre. Cette prolongation doit toutefois se limiter à la durée nécessaire à l’organisation de cette procédure. Il est expressément précisé qu’un accord-cadre peut légalement de ce fait dépasser 4 ans pour un pouvoir adjudicateur, 8 ans pour les entités adjudicatrices et 7 ans pour les marchés de défense et de sécurité. Pour les concessions conclues dans le domaine de l’eau potable, de l’assainissement et des déchets, la conclusion de cet avenant qui pourrait porter la durée de ces contrats au-delà de 20 ans, est dispensée de la saisine préalable des services de l’Etat.
Adaptation des mesures d’exécution des contrats publics
- Marchés publics – possibilité de modifier les conditions d’octroi des avances
Les acheteurs peuvent, par avenant, modifier les conditions de versement de l’avance et porter son taux à un montant supérieur à 60 % du montant du marché ou du bon de commande. Ils ne sont pas tenus d’exiger la constitution d’une garantie à première demande pour les avances supérieures à 30 % du montant du marché.
- Difficultés d’exécution des contrats publics : définition des règles qui s’imposent quelque soit la rédaction des contrats SAUF si ces contrats sont plus favorables au titulaire du contrat :
- Gestion des retards d’exécution : modalités de prolongation des délais d’exécution
Lorsque le titulaire ne peut pas respecter le délai d’exécution ou que cette exécution conforme aux délais stipulés nécessiterait des moyens dont la mobilisation ferait peser sur le titulaire une charge manifestement excessive, ce délai est prolongé d’une durée au moins équivalente à celle de la durée de l’état d’urgence sanitaire augmentée de deux mois = soit de 4,5 mois, sur demande du titulaire exprimée avant l’expiration du délai contractuel.
- Gestion des pénalités et absence de sanction aux frais et risques du titulaire
Lorsque le titulaire est dans l’impossibilité d’exécuter tout ou partie d’un bon de commande ou d’un contrat, notamment lorsqu’il démontre qu’il ne dispose pas des moyens suffisants ou que leur mobilisation ferait peser sur lui une charge manifestement excessive : a) Le titulaire ne peut pas être sanctionné : absence de pénalités contractuelles, absence de responsabilité contractuelle engagée pour ce motif ; b) L’acheteur peut conclure un marché de substitution avec un tiers pour satisfaire ceux de ses besoins qui ne peuvent souffrir aucun retard, nonobstant toute clause d’exclusivité et sans que le titulaire du marché initial ne puisse engager, pour ce motif, la responsabilité contractuelle de l’acheteur ; l’exécution du marché de substitution ne peut être effectuée aux frais et risques de ce titulaire.
- Dispositions propres aux marchés publics
Montant de l’indemnité du fait de l’annulation d’un bon de commande ou de résiliation d’un marché public du fait des circonstances du Covid-19 Sauf dispositions contractuelles plus favorables au titulaire, celui-ci peut être indemnisé, par l’acheteur, des dépenses engagées lorsqu’elles sont directement imputables à l’exécution d’un bon de commande annulé ou d’un marché résilié. A noter = si les marchés publics font références aux différents CCAG, les dispositions plus favorables relatives à la résiliation pour cause d’évènement extérieur s’appliqueront : ex. article 34.2.2.5 CCAG FCS qui vise : « tous préjudices subis du fait de la résiliation par le titulaire et éventuellement ses sous-traitants et fournisseurs ».
Suspension d’un marché à prix forfaitaire en cours d’exécution
L’acheteur procède sans délai au règlement du marché selon les modalités et pour les montants prévus par le contrat. A l’issue de la suspension, un avenant détermine les modifications du contrat éventuellement nécessaires, sa reprise à l’identique ou sa résiliation ainsi que les sommes dues au titulaire ou, le cas échéant, les sommes dues par ce dernier à l’acheteur.
- Dispositions propres aux concessions
Suspension de l’exécution Si le concédant est conduit à suspendre l’exécution d’une concession, alors tout versement d’une somme au concédant est suspendu. Si la situation de l’opérateur économique le justifie et à hauteur de ses besoins, une avance sur le versement des sommes dues par le concédant peut lui être versée. Modification des modalités d’exécution de la concession sans suspension de celle-ci Si le concédant est conduit à modifier significativement les modalités d’exécution prévues au contrat, le concessionnaire a droit à une indemnité destinée à compenser le surcoût qui résulte de l’exécution, même partielle, du service ou des travaux, lorsque la poursuite de l’exécution de la concession impose la mise en œuvre de moyens supplémentaires qui n’étaient pas prévus au contrat initial et qui représenteraient une charge manifestement excessive au regard de la situation financière du concessionnaire. A noter = si cette indemnité est inférieure à celle susceptible d’être réclamée au titre de la force majeure, de l’imprévision et même du pouvoir de modification unilatérale du contrat public par la personne publique, elle ne trouve cependant à s’appliquer QU’A DEFAUT de stipulations contractuelles plus favorables. Or, les concessions bien rédigées prévoient les indemnités dûes dans ces hypothèses.
Adaptation des délais et règles pour les décisions administratives
- Prorogation des délais de validité de certaines mesures administratives ou juridictionnelles :
Les mesures suivantes dont le terme vient à échéance au cours de la période comprise entre le 12 mars et le 24 juin 2020 sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la fin de cette période, soit 24 août 2020 : 1° Mesures conservatoires, d’enquête, d’instruction, de conciliation ou de médiation ; 2° Mesures d’interdiction ou de suspension qui n’ont pas été prononcées à titre de sanction ; 3° Autorisations, permis et agréments ; 4° Mesures d’aide, d’accompagnement ou de soutien aux personnes en difficulté sociale ; 5° Les mesures d’aide à la gestion du budget familial. Toutefois, le juge ou l’autorité compétente peut modifier ces mesures, ou y mettre fin, lorsqu’elles ont été prononcées avant le 12 mars 2020.
- Dispositions applicables à l’Etat, aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics administratifs ainsi qu’aux organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale :
- Délais imposés à l’administration
Les délais au terme desquels une décision, un accord ou un avis peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont suspendus jusqu’au 24 juin 2020. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 24 juin 2020, est reporté au 24 juin 2020. A noter : ces règles sont applicables aux délais impartis à l’administration pour vérifier si dossier est complet ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande ainsi qu’aux délais prévus pour la consultation ou la participation du public.
- Délais imposés par l’administration
Sauf s’ils ont expiré avant le 12 mars 2020, les délais imposés par l’administration en application de la loi et des règlements, à toute personne pour réaliser des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions de toute nature, sont suspendus jusqu’au 24 juin 2020, sauf lorsqu’ils résultent d’une décision de justice. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 24 juin 2020, est reporté au 24 juin 2020. A Noter : des exceptions aux principes de report pourront être mises en place par décret.
Les délais applicables en matière de recouvrement des créances publiques par les comptables publics en cours à la date du 12 mars 2020 ou commençant à courir entre le 12 mars et le 24 juin 2020 et prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d’un droit ou d’une action sont suspendus jusqu’au 24 août 2020.
- Aménagement des procédures d’enquête publique toute enquête publique déjà en cours à la date du 12 mars 2020 ou devant être organisée entre le 12 mars et le 24 juin 2020
Lorsque le retard résultant de l’interruption de l’enquête publique ou de l’impossibilité de l’accomplir en raison de l’état d’urgence sanitaire est susceptible d’entraîner des conséquences difficilement réparables dans la réalisation de projets présentant un intérêt national et un caractère urgent, l’autorité compétente peut en adapter les modalités : 1° l’enquête publique en cours se poursuit en recourant uniquement à des moyens électroniques dématérialisés et la durée totale de l’enquête peut être adaptée pour tenir compte, le cas échéant, de l’interruption due à l’état d’urgence sanitaire. 2° l’enquête publique est d’emblée lancée et conduite uniquement par des moyens électroniques dématérialisés. Lorsque la durée de l’enquête va au-delà du 24 juin 2020, et pour la durée de l’enquête restant à courir, l’autorité compétente dispose de la faculté de revenir aux modalités d’organisation de droit commun énoncées par les dispositions qui régissent la catégorie d’enquêtes dont elle relève.
Adaptation des délais et règles de procédures devant les juridictions administratives
De nombreuses dispositions sont prises pour assurer la tenue des audiences selon des modalités inédites tenant notamment, à la possibilité de tenir les audiences hors la présence du public, l’organisation d’un contradictoire en visioconférence ou même par téléphone, absence de prononcé des conclusions du rapporteur public… Tous les référés peuvent faire l’objet d’une décision par ordonnance motivée sans audience. Le juge des référés informe alors les parties de l’absence d’audience et fixe la date à partir de laquelle l’instruction sera close. La notification des décisions de justice est régulièrement faite lorsqu’elle l’est uniquement aux avocats, et non plus à partie par courrier adressé en recommandé avec accusé de réception. Les dispositions relatives à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période tels qu’exposés ci-dessus, sont applicables aux procédures devant les juridictions de l’ordre administratif, sauf en ce qui concerne le contentieux des étrangers et le contentieux électoral. A noter :
- Les clôtures d’instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars et le 24 mai 2020, sont prorogées de plein droit jusqu’au 24 juin 2020, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge.
- Durant la période comprise entre le 12 mars et le 24 mai 2020, le point de départ des délais impartis au juge pour statuer est reporté au : 1er juillet 2020.
Par Aurélia Minescaut du département de droit Public
Toute l’équipe VAUGHAN AVOCATS est mobilisée et à votre disposition pour vous aider dans cette période de crise. Si vous avez des questions particulières, n’hésitez pas à nous écrire à contact@vaughan-avocats.fr, nous ferons notre possible pour vous répondre dans les 24 h.